Qiota, l’achat en ligne d’article pour un nouveau public

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Qiota lance une solution innovante de micro-paiement pour la presse en ligne, Culture RP a rencontré Alessandro Massi et Peter Pontuch, les deux fondateurs de Qiota.

 

Photo Alessandro Massi et Peter Pontuch

 

Qiota est une jeune startup Française proposant un portemonnaie électronique qui permet l’achat de contenus payants de la presse en ligne. Nous sommes majoritairement rétifs à payer pour de l’information. Pourquoi devrait-on le faire aujourd’hui ?

Le secteur de la presse en ligne est actuellement en pleine remise en question des choix stratégiques du passé. Les modèles reposant sur la publicité comme source majoritaire de revenus ont pâti du ralentissement du marché de la pub en ligne. Cela a davantage été renforcé par la percée des outils « adblock ». Les médias doivent donc repenser leurs modèles économiques, et notamment comment ils monétisent leur contenu premium.

Le public acceptera de payer pour de l’information sous deux conditions. D’une part, que le prix soit justifié par la qualité du contenu, reposant sur un travail journalistique de fond et n’étant pas facilement accessible ailleurs sur la toile. D’autre part, que les systèmes de vente évoluent pour tenir compte des nouveaux modes d’accès à l’information d’aujourd’hui, notamment grâce aux réseaux sociaux. Certes, augmenter les abonnements reste clé pour les éditeurs. Mais tout le monde ne peut pas être abonné à tout. Le contenu de qualité ne devrait pas être réservé exclusivement aux abonnés et la vente d’articles à l’unité devrait permettre d’accéder à des lecteurs occasionnels.

En parallèle, tout un chantier s’ouvre sur l’éducation du public, et particulièrement des jeunes, sur l’importance des médias indépendants pour les sociétés démocratiques. Et qui dit indépendant, dit économiquement viable. Payer pour du journalisme n’est pas « se faire avoir », mais au contraire contribuer au bon fonctionnement de notre société.

Quels sont les avantages du service pour l’utilisateur? Comment fonctionne votre solution et quels types de contenus peut-on consulter ?

Pour l’utilisateur, le service Qiota s’apparente à un portemonnaie électronique, dont la monnaie, les crédits Qiota, est utilisable dans toutes les enseignes de presse en ligne partenaires. L’utilisateur alimente son compte en fonction de son utilisation par carte bancaire. Enfin, le système Qiota s’intègre directement sur le site de l’éditeur à travers un simple bouton. Quand on a reçu d’un ami un lien vers un article et qu’on atterrit sur le site de l’éditeur, pas besoin de le quitter vers une site tiers pour acheter ce contenu à l’unité.

Tous les contenus réservés aux abonnés, comme articles, infographies, ou vidéos, seront consultables par les utilisateurs de Qiota.

Du côté des éditeurs, quel modèle économique proposez-vous ? Pourquoi votre solution est plus intéressante que les systèmes qui existent déjà sur le marché ?

Le modèle économique que nous proposons aux éditeurs est l’un des aspects les plus innovants de notre solution. Qiota achète une multitude d’abonnements auprès des éditeurs pour une période fixe et porte le risque des ventes à l’unité qui s’effectueront directement sur le site de l’éditeur. Nous voulons réconcilier ainsi la préférence des éditeurs pour les revenus stables issus des abonnements d’une part, avec, d’autre part, l’envie des lecteurs occasionnels de lire plus librement du contenu premium dans un univers varié de médias.

Nous pouvons donc lister trois principaux avantages pour l’éditeur. Premièrement, il s’agit de mieux monétiser le segment des lecteurs occasionnels (qui, dans l’immédiat, n’ont pas vocation à s’abonner) en leur donnant une possibilité facile d’acheter du contenu premium à l’unité. Deuxièmement, comme expliqué avant, Qiota génère de nouveaux abonnements pour l’éditeur et donc assure une meilleure prévisibilité des revenus sur le segment des lecteurs occasionnels. Et enfin, notre solution s’intègre directement sur la page du journal, ce qui permet de garder le lecteur occasionnel dans le périmètre de l’éditeur et lui proposer une suite de lecture selon la ligne éditoriale.

Quels sont vos objectifs d’acquisitions d’inscrits actif et le nombre d’éditeurs souhaité ? Quels sont les principaux risques pour vous ?

Notre objectif pour l’année en cours est d’atteindre 8000 utilisateurs actifs (qui utilisent le système régulièrement) pour environ une douzaine de titres partenaires. Nous viserons dans l’année suivante un triplement de la base d’utilisateurs actifs pour un doublement du nombre d’enseignes de presse partenaires. Le secteur de la presse est en pleine ébullition, avec l’apparition de nouveaux modèles de diffusion et de commercialisation surtout sur le segment des consultations mobiles. Notons, par exemple, l’ouverture de Facebook Instant Articles à tous les éditeurs. Nous devrons donc rester vigilants face à ces développements et être capable d’y adapter rapidement notre solution.

Comment rassurez-vous les éditeurs sur le fait que la vente à l’unité ne va pas encourager les lecteurs à se désabonner ?

Cette crainte est souvent évoquée par les commentateurs, et parfois par les éditeurs eux-mêmes, comme l’un des freins au développement de la vente à l’unité. Mais tout dépend de la manière dont le système de vente à l’acte est conçu. Par exemple, personne ne dit que la vente de titres de transport à l’unité conduit les gens à abandonner en masse leurs tickets mensuels. Il faut juste reconnaître que, comme dans les transports, les deux types de commercialisation de contenu éditorial servent des publics différents. L’abonnement est une solution adaptée pour un lecteur qui est disposé à consulter le contenu de manière régulière et intense. La vente par article vise ceux qui, à priori, ne voient pas l’utilité de s’abonner à un un journal donné, soit parce qu’ils sont déjà abonnés à d’autres titres, soit parce qu’ils lisent peu la presse. Au vu des chiffres de trafic des éditeurs, les non-abonnés constituent une nette majorité des consultations. Il nous semble judicieux de proposer à ces lecteurs occasionnels une solution intermédiaire et ainsi leur éviter la frustration du paywall. Et puis, en consultant de temps en temps du contenu premium à l’unité, certains lecteurs occasionnels peuvent finir par s’abonner. Mais laissons-leur la possibilité d’arriver à cette conclusion sans leur forcer la main.

Repenser les produits éditoriaux autour du service, cesser de produire ce qui a peu de valeur pour le lecteur tout en proposant un pluralisme des points de vue et donner l’accès du plus grand nombre à une information de qualité. N’est-ce pas cela l’objectif de Qiota ?

Tout à fait. La refonte des modèles économiques nécessite une analyse approfondie des comportements et des préférences des lecteurs afin d’y adapter l’offre éditoriale. De nombreux éditeurs le font déjà et cette tendance va certainement s’accentuer dans les années à venir. Il faudra cependant trouver un juste équilibre entre comprendre et servir le lecteur d’une part, et se laisser emporter par une course à l’audience d’autre part. Avec une boîte à outils de monétisation plus riche, le journalisme de fond peut aussi être rentable à long-terme. Mais soyons réalistes: ce n’est pas Qiota qui peut révolutionner la presse. C’est la presse qui se révolutionnera d’elle-même, en s’équipant d’un mix de stratégies et d’outils de diffusion et de commercialisation suffisamment riche et cohérent, afin d’assurer sa soutenabilité économique. Nous pensons que Qiota a sa place dans ce mix de stratégies optimal.

Marc Michiels

Marc Michiels

Rédacteur en chef Culture RP, Content Marketing et Social Média Manager : « Donner la parole à l’autre sous la forme d’une tribune, une interview, est en quelque sorte se donner à lire ; comme une part de vérité commune, pour qu'apparaisse le sens sous le signe… ». / Retrouvez-moi sur LinkedIn

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